En cette fin de vingtième siècle, les mutations de la communauté politique portent sur deux niveaux : le fonctionnement interne de la démocratie représentative et les modifications des frontières de la communauté politique. Lire la suite
Démocratie médiatique, société de l’information, construction européenne en panne, montée des attitudes populistes, déchirures de l’État-providence, avenir problématique du travail salarié, crispations identitaires au sein et contre l’État-nation, inflation et élargissement des revendications en terme de droits individuels, etc. Tous ces domaines sont actuellement sujets à des mutations significatives.
Dans ce contexte, les diverses contributions réunies dans le présent volume s’articulent autour des hypothèses suivantes : la crise actuelle de la démocratie représentative ne peut se réduire à un dysfonctionnement strictement "technique" des institutions publiques. De plus, la volonté d’élargir la communauté politique à d’autres acteurs (nations, nature, générations futures, productions scientifiques, etc.) ne peut pas être rejetée dans le champ des particularismes rétrogrades.
Le processus traditionnellement identifié comme une crise relève par contre du registre de la mutation et de la recomposition des structures et des modes de représentation. Cette évolution doit être comprise comme la crise de la représentation du lien social et la recherche d’un nouveau paradigme structurant la communauté politique. L’approche transdisciplinaire de l’ouvrage dégage la continuité et la profondeur d’une évolution qui traverse plusieurs champs et phénomènes distincts : liberté de la communication et médias, travail salarié et intégration sociale, représentation politique et construction européenne, nature et cité, État et nation. Bref, nos modes de représentation de l’articulation entre autorité publique et société doivent être revus. Sur la base de cette hypothèse globale de la crise de la représentation du lien social, il s’agit de penser positivement les modifications théoriques des représentations politiques et juridiques du rapport à autrui qui peuvent être dégagées de ces transformations de notre compréhension de la souveraineté démocratique. Autrement dit : quels nouveaux paradigmes dégager de ces mouvements de recomposition de la communauté politique afin de pouvoir pleinement en rendre compte ? Bref, ces mutations de la démocratie représentative s’articulent autour de deux questions principielles.
Primo, comment dépasser la conception de l’individualisme radical de développer un projet collectif sans perdre les acquis de la modernité démocratique en terme de droits et libertés individuels ? Secundo, comment, au sein d’une même communauté politique, réaliser la reconnaissance de la spécificité culturelle de l’autre sans verser dans la glorification du communautarisme ? Une question qui concerne également la reconnaissance de nouveaux membres de la communauté politique, non directement humains (nature, objets et hybrides scientifiques, générations futures, etc.).
Ce volume collectif réunit principalement les contributions à un séminaire transdisciplinaire de recherche organisé, au cours de l’année 1995, par le Centre de philosophie du droit de l’Université libre de Bruxelles, avec le soutien du Fonds de la recherche fondamentale collective (FNRS-FRFC). Les auteurs sont sociologues, politologues, économistes, juristes ou philosophes, français et belges, et ont, pour la plupart, déjà plusieurs publications à leur actif dans leur domaine de spécialisation.