Laurent de Briey confronte deux stratégies de renouvellement du projet moderne, celle de Jürgen Habermas et celle d’Alain Renaut. Il dégage les enjeux philosophiques sous-jacents à ces deux paradigmes et à leur conflit. Lire la suite
Lorsque, au début des années quatre-vingt, Habermas affirme que la modernité est un projet inachevé, il renouvelle sa confiance en une raison alors accusée d’avoir rendu possible la barbarie totalitaire. À l’encontre des chantres d’une post-modernité au mieux autocontradictoire, il conteste que le processus moderne de rationalisation soit en même temps un processus de déshumanisation. Toutefois, pour réaliser le potentiel émancipatoire de la modernité, il importe, selon lui, de procéder à un changement de paradigme philosophique afin de surmonter les insuffisances de la philosophie du sujet dans le cadre de laquelle demeureraient les philosophes modernes comme leurs critiques post-modernes. Habermas est aujourd’hui devenu l’un des philosophes contemporains les plus influents et sa volonté de renouveler le projet moderne est largement partagée. Cependant, est-il exact que ce renouvellement impose un changement de paradigme ? En quoi consiste un tel changement et quel en est le prix ? En renonçant à la philosophie du sujet au profit de la communication et de l’intersubjectivité, ne risque-t-on pas, comme le croit Alain Renaut, de miner le fondement de la responsabilité personnelle sur laquelle repose l’État de droit ? Dès lors, ne serait-il pas préférable de suivre Renaut lorsque celui-ci entend renouveler le projet moderne tout en demeurant au sein de la philosophie du sujet ? Le présent ouvrage entend répondre à ces questions en confrontant systématiquement ces deux stratégies de renouvellement du projet moderne et en mettant en évidence les enjeux philosophiques sous-jacents aux différents paradigmes philosophiques et à leur conflit.