Quelles sortes de communautés réunissent les hommes ? Comment sont-elles construites ? Où est l’unité, où est la multiplicité de l’humanité ? Les hommes peuvent former des communautés distinctes, antagonistes, s’opposant violemment. La division externe est-elle nécessaire pour bâtir une cohésion interne ? Rien n’est plus actuel que ces questions. Lire la suite
Parmi toutes les formes de dissensions humaines, les études qui composent ce volume s’intéressent à l’hérésie. L’hérésie se caractérise par sa relativité. Nul ne se revendique hérétique, sinon par provocation. Le qualificatif d’hérétique est toujours subi par celui qui le porte et il est toujours porté sur autrui. Cela rend l’hérésie difficilement saisissable si l’on cherche ce qu’elle est en elle-même. Mais le phénomène apparaît avec davantage de clarté si l’on analyse les discours qui l’utilisent. Se dessinent dès lors les représentations qui habitent les auteurs de discours sur l’hérésie et les hérétiques, discours généralement sous-tendus par une revendication à l’orthodoxie. Hérésie et orthodoxie forment ainsi un couple, désuni mais inséparable. Car du point de vue de l’orthodoxie, l’hérésie est un choix erroné, une déviation, voire une déviance. En retour, c’est bien parce qu’un courant se proclame orthodoxe que les courants concurrents peuvent être accusés d’hérésie. Sans opinion correcte, pas de choix déviant. La thématique de l’hérésie s’inscrit ainsi dans les questions de recherche sur l’altérité religieuse. À travers l’accusation d’hérésie, une image de l’autre se construit, une communauté se constitue, parfois fictive et toujours connotée négativement. En revanche, la communauté qui se proclame orthodoxe se définit comme telle en fixant les limites au-delà desquelles non seulement l’autre est exclu mais devient l’ennemi à éliminer. Par là se renforce sa cohésion.