Selon quelles logiques un contenu est-il qualifié d’obscène ou de pornographique ? Cet ouvrage pointe l’importance décisive de la censure dans ces processus de qualification, tout en retraçant les évolutions de ces (dis)qualifications. Lire la suite
L’obscénité et la pornographie renvoient non à l’essence de certaines formes de mise en scène de la sexualité mais à la qualification – morale, religieuse, juridique, littéraire… – qui en est faite par les acteurs sociaux. L’enjeu est le plus souvent de justifier leur libre circulation ou au contraire la nécessité de l’encadrement de leur production et de leur diffusion. La censure – entendue ici au sens souple de disqualification d’un contenu – est donc un des critères mêmes de définition de la pornographie et de l’obscénité. À partir de cas allant du XIXe siècle à nos jours, l’ouvrage met en lumière la diversité des phénomènes d’étiquetage, de leurs modalités, de leurs auteurs, de leurs logiques et de leurs conséquences. Les contributions rassemblées dévoilent les mobilisations qui conduisent au classement comme obscène d’une œuvre ou d’un acte – livre, BD, film, photo, dessin, poème, pièce de théâtre, scènes de music-hall, … – ainsi que la pluralité des enjeux – moraux, politiques, culturels, scientifiques… – qui s’attachent à ces qualifications. Il souligne la multiplicité des arguments avancés pour justifier les frontières ainsi dessinées entre le « condamnable » et le « tolérable ». Illustrant les formes très variées que peut prendre, selon les contextes et les objets, le contrôle des produits obscènes ou pornographiques, les contributions permettent aussi de saisir les effets des étiquetages et notamment leur contournement ou leur réappropriation.
Ancrés dans des disciplines multiples (juridique, littéraire, historique, sociologique, philosophique, psychanalytique…), les auteurs ont privilégié une approche constructiviste, tournée vers des études empiriques et socio-historiques, attentives aux luttes des acteurs de l’espace social. Leurs contributions sont articulées autour de questions communes ou transversales : les catégories qui fondent les (dis)qualifications, à travers une approche du droit ; la centralité des enjeux culturels dans la (dis)qualification des mises en scènes de la sexualité et les conséquences de ces processus, permettant de saisir combien les formes mêmes des représentations de la sexualité sont influencées par les discours dont elles font l’objet.
La dernière partie propose un déplacement du regard, en traitant de la façon dont les mises en scène de la sexualité peuvent être appropriées, c’est-à-dire requalifiées, dans des perspectives militantes, d’interrogation de l’ordre social, de contestation ou de réaffirmation des rapports de pouvoir.